On se ment et on forme les élèves à se mentir eux-mêmes à travers des démarches tarabiscotées, leur faisant croire qu’on peut enfin faire fleurir des déserts par des coups de magie dans l’ombre.
Nous ne sommes guère des acteurs de séries télévisées, donc ne faisons pas nos airs de surpris devant ces résultats catastrophiques à l’examen du bac. Rien ne surprend mesdames et messieurs.
Cette année scolaire n’a certes pas été perturbée ; mais sont arrivés en terminale des élèves qui ont fait leurs classes de seconde et de première jalonnées de grèves et autres perturbations non jugulés par un ministère de l’éducation incapable et jouant au cache-cache avec les grévistes. Dites-moi comment faire une bonne classe de terminale si les deux classes charpentes du second cycles n’ont pas tenu debout, ont leurs ferrailles rongées par le laxisme ?
A cela s’ajoute un fait dangereux, qui enfin tarabuste ma conscience. On a laissé des jeunes s’émoustiller dans la médiocrité et la facilité pendant tout un cycle qu’ils veulent sanctionner par une évaluation sérieuse. Saviez-vous que la moyenne de passage dans la plupart des lycées au Sénégal est de 8,50/20. Ce n’est pas une erreur, je précise 8, 50/20. On laisse les élèves aller en classe supérieure avec une note qui rime avec l’échec, et on veut de bons résultats à l’arrivée, on espère un pourcentage national satisfaisant, une relève. Belle farce…
Bon c’est normal, la comédie paye bien dans ce pays, donc on trouve toutes les occasions pour être acteur.
Escompter l’excellence après un cycle de médiocrité c’est vouloir cultiver de l’or alors qu’on n’a même pas semé de la paille.
Ce n’est pas la peine de S’A-L-A-R-M-E-R. Déracinons le mal par la racine ou assumons ce futur où le pays sera porté désespérément par des personnes plus nulles que celles qui font l’objet de nos critiques les plus acerbes.
On me dira que le niveau est faible et que les jeunes sont devenus paresseux. C’est une vérité « en partie vraie », et qui occulte une autre responsabilité.
Victime de ses opportunités dans ce siècle digital, la jeunesse passe énormément de temps devant les réseaux sociaux et tous les séries qui foisonnent derrière le petit écran. Cette même jeunesse est en partie sacrifiée par ceux qui la traitent de nulle en refusant d’adapter le système éducatif à sa réalité. Responsabilités partagées !
Le sujet de dissertation de Français au bac 2019 a porté sur cette citation de Jule Renard : « Nous voulons de la vie au théâtre, et du théâtre dans la vie ». Si des candidats se sont permis de disserter sur « wiri-wiri » et « Pod et marichou » c’est parce que le niveau est assez faible car ils ne font même pas la différence entre le théâtre dans son acception littéraire et un téléfilm, mais aussi le curricula n’a même pas cherché à s’adapter au contexte actuel.
A quel sénégalais du XXIe siècle des pièces comme Tartuffe ou Dom Juan parlent ? Et pourquoi ne pas enseigner le Mandat, l’Exil d’ Alboury ? Qu’attendre pour enseignant le théâtre comme un genre sous les influences d’un monde dominé par les séries, bref le défi n’est-il pas d’enseigner toutes les disciplines en leur donnant l’habit qu’elles doivent porter une fois sur nos scènes actuelles pour ne pas dire les réinventer ?
Seule la volonté manque.
Patherson
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