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Pau, le pot est dans notre canari.

N'en déplaise aux activistes et aux panafricanistes de l'extrême gauche, je pense que la critique contre la présence française dans le Sahel est souvent mal fondée, mal calculée, mal mesurée.

Ces critiques ont toute leur légitimité et relèvent d'une revendication qui se veut noble, mais on situe mal les responsabilités. C’est un discours qui exige une prise en charge de cette crise par les africains, une exigence d’autonomie, mais sur quelles bases ? Quels sont nos acquis pour faire face à la menace ? Faudrait-il faire déguerpir un pays qui a envoyé ses 4500 hommes pour risquer leur vie avec le seul argument qui consiste à dire qu’ils nous exploitent ? N’aurions-nous pas des intérêts à défendre comme tous les Etats ?

Cet activisme se résume à tirer sur tout ce qui porte les couleurs "bleu, blanc, rouge " et d'inventer à ce soi-disant bourreau, qui, même parfois victime d'être désigné le bouc émissaire, responsable de tous nos maux, une entreprise d'exploitation de nos ressources. Une précision à faire c'est que la France n'a pas ses pierres précieuses au Mali, mais au Niger avec Areva, et certains puits sont en train de fermer.

Ensuite, les soldats français sont morts pour défendre des africains, on salue jamais ce geste, on est aveuglé par notre colère et notre victimisation qui changent le camp de la haine. J’entends déjà l’autre me rétorquer : « des africains sont morts pour libérer la France ».

Avant de demander aux forces étrangères de quitter, il faut d'abord exiger qu'on ait des armées solides et outillées en logistique de pointe et non des armées qui existent sans doctrine d'emploi et qui confondent la bravoure à cette manie saugrenue de se muer en chair à canon. Ce qu'il faut ou fallait critiquer c'était le fait qu'il n'eut pas de commandement conjoint, ce qui est désormais réglé en principe, au sommet de Pau. Il faut fustiger le fait qu'on ait déployé des forces militaires dans la région sans accompagner les populations à recoudre le tissu économique, social et travailler sur les identités. Le G5 qui peut et doit devenir une force régionale au moins, doit s’investir davantage sur des projets de gouvernance inclusive, d’accompagnements des populations et de création d’environnements sûrs et viables au lieu de tout miser sur le militaire.

La réponse n'est pas uniquement militaire. Pour justifier ce constat, il suffit de se poser la question de savoir qui est, et qui devient terroriste et/ou djihadiste ? A cette question, nous savons que n'est pas terroriste uniquement celui qui est endoctriné par une idéologie, mais aussi peut devenir soldat de la terreur ce jeune adolescent qui a perdu le privilège de rêver un futur radieux, ce jeune qui veut nourrir sa famille et veut protéger son bétail, et que la milice lui promette une arme. Ce sur quoi il faut jeter des pierres aussi, c'est l'inaction de l'Union Africaine, du moins, sa série de déclarations, au lieu de penser une stratégie de défense conjointe africaine. L'idée a été soulevée de construire au moins une armée régionale pilotée par la CEDEAO, les pays du G5 à eux-seuls sont faibles. La preuve, qui finance ?

L’on m’opposera un argument qui semblerait pertinent en disant avec légèreté qu’on n’a pas demandé l’aide à la France. Mais s’il y a lieu de le rappeler, la France est intervenue sur demande du président intérimaire Diocounda Traoré.

Quant aux intérêts, c’est devenu un argument trop superficiel de dire que la France intervient pour ses intérêts. N’oublions pas la maxime de De Gaule, « Les Etats n’ont ni amis, ni ennemis, ils n’ont que des intérêts ». Alors gérons intelligemment les nôtres. Et je mettrai des réserves à cet argument car Le Mali est le 87e client de la France, son 165e fournisseur. Les exportations maliennes vers la France (concentrées sur l'or, le coton et le cheptel bovin) ne dépassent pas 10 millions d'euros en moyenne par an, soit à peine 0,002% du total des importations tricolores.




Derrière l’écrasante majorité des interventions étrangères dans les pays en conflit, il y a des intérêts stratégiques à poursuivre, mais le Mali n’a pas de ressources minières exploitables et durables prouvées jusque-là, même s’il y a l’or, la bauxite, le pétrole etc. Et la France se soucierait plus du Niger où Areva exploite l’uranium. Par rapport à son or, il est exploité par des entreprises anglo-saxonnes pour la plupart.

On ne peut absolument pas nier qu’il ait des intérêts pour la France, l’UE et toutes les parties prenantes, mais l’esprit vindicatif ne prend souvent pas le recul nécessaire pour reconnaître aussi la dimension humaine de l’acte. Bien entendu, la France ne peut pas réclamer une dette morale à l’Afrique et je pense même qu’il faut la laisser intervenir pour laver le sang du passé.

L’intérêt supérieur dans tout cela, c’est que protéger le Mali et la zone des trois frontières reviendrait à empêcher au Sahel de devenir un poumon terroriste, mais si cela arrive, le monde sera comme un organisme atteint d’un cancer aigu. Les intérêts de tous sont menacés.


Il urge encore une fois pour nous d’avoir une armée régionale et/ou africaine car la solution au bout du compte est bien africaine.

En attendant, les Etats-Unis menacent déjà de retirer leurs troupes. Et Barkhane dépendait fortement d’Africa Command (AFRICOM).

L’Afrique doit se prendre en main d’abord. Ce mot n’annule en rien la noblesse de ce combat panafricaniste, mais moins de passion rendrait service à une raison qui sache aborder avec précision la réalité du terrain.

 
 
 

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