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Les mesures barrières défoncées

En circulant dans les réseaux sociaux, je suis tombé sur une ironique vidéo dans laquelle on a personnifié la covid-19 en train de danser après le discours du Président de la République du Sénégal.

Au-delà de la comédie, il est clair que lorsqu’on allège le dispositif de prévention et de riposte alors que les attaques s’aggravent, on ouvre à l’ennemi la voie pour nous massacrer.

Le camp des sapeurs-pompiers de Touba vient d’être mis en quarantaine, et des médecins commencent à être contaminés. Donc, ceux qui sont censés nous sauver sont affectés.

Aujourd’hui, à la date du 13 mai, en plus des 1301 cas sous traitements[1], il y a 7000 cas suivis. 7000 cas suivis représentent 7000 cas potentiels au moment où les rangs de nos défenses sont doublement affaiblis. Affaiblis par le temps car depuis la confirmation du premier cas au Sénégal le 2 mars dernier, les médecins sont en premières lignes et très exposés, sans répit, et aujourd’hui, leur effectif diminue. A signaler que depuis le 11 mai, les tests qui reviennent positifs par jour dépassent la barre des 100 cas. L’heure n’est pas à la baisse de la garde.

IL y a une contradiction notoire lorsqu’on donne le ton d’un quasi-déconfinement et qu’on continue de nous dire : « restez chez vous ». Défoncer les mesures barrières et demander de les respecter, bel cafouillage communicationnel !

En allégeant les mesures de prévention avec l’aménagement les horaires du couvre-feu fixées désormais de 21h à 5h, l’ouverture des marchés 6 jours sur 7 ainsi que la réouverture des lieux de culte, il semblerait qu’on ait fait des efforts jusque-là pour ensuite tout jeter à l’eau.

Avec un montant de 1000 milliards de Fcfa qu’on entend et qu’on ne voit pas, le Fonds de riposte et de solidarité contre les effets du COVID-19, à condition d’être bien géré devrait permettre à tous les sénégalais de pouvoir vivre dans les conditions de restriction de déplacements et des activités pendant un moment sans qu’il y ait un problème. Mais lorsque ceux qui doivent recevoir un sac de riz se retrouvent avec deux kilogrammes, il y a un manque manifeste du sens de la gestion équitable des choses.

Maintenant, si toute cette somme injectée est pour arriver à une décision qui porte les accents d’un « débrouillez-vous », où est passé le reste de l’argent ? Comme on n’a pas le sens des priorités, est-ce pour faire enfin rouler le TER, refaire la peinture de Dakar Aréna ?

L’argument qui consiste à justifier le fait de ne pas appliquer le confinement est à revoir même si la population active dépend fortement du secteur informel. En Afrique du Sud, il y a des townships où la distance sociale est un luxe, c’est pire que nos banlieues, et ils sont allés en confinement total. Si ces milliards étaient bien gérés, des familles entières pourraient être bien nourries et traverser le confinement sans grand mal.

Apprendre du passé et des bons exemples chez nos voisins doit être un exercice de tous les jours.

Le Maroc s’est démarqué à travers sa stratégie de lutte avec des mesures d’anticipation concernant la mise en place d’un Comité de Veille économique et le lancement d’un Fonds spécial Covid-19 qui a levé 32 milliards de dirhams de dons ($3.2 milliards). En ce qui concerne son secteur informel, le Sénégal peut s’inscrire à l’école du roi. En effet, le fonds a permis d’apporter une aide pécuniaire suivant le nombre de personnes par ménage : $80 par famille de deux personnes, $100 par famille de trois personnes, et $120 par famille de plus de quatre personnes[2].

L’ironie c’est que les forces de défense et de sécurité et les personnels de santé si félicités vont se retrouver comme étant les sacrifiés à l’autel de l’amateurisme de l’État.

Les responsabilités sont partagées aussi. Parmi les sénégalais, nombreux sont ceux qui ont fait le vœu de rouvrir les lieux de culte, il y a même finalement des lobbies religieux dans ce pays. Allez prier ! Mais trêve d’euphémisme et de diplomatie, les imams ne sont pas des médecins, les prêtres ne sont pas des sapeurs-pompiers. Partagées, car l’État n’a pas le droit d’être faible en ces circonstances, ni non plus le Président qui se trouve à sa tête. Le chef de l’État est le seul représentant de tous les sénégalais toute obédience et ethnie confondues. Mais les chefs religieux représentent des communautés bien déterminées.

Quant aux autres pays africains, il est temps de comprendre que le monde ne nous doit pas du babysitting. Lorsque le secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres le 27 mars 2020[3] donnait des prévisions catastrophiques sur le continent, les camarades de la réaction ont interprété ses propos comme relevant du racisme. Le temps est un bon juge, aujourd’hui les pays d’Afrique semblent s’arranger pour lui donner raison.

Les enquêtes montrent que dans le continent, on a une moyenne de moins d’un lit et d’un respirateur pour 100.000 habitants[4].

Au moment où dans le continent on fait 685 tests par million d’habitants, l’Italie à elle seule, en fait 37.000 par million d’habitants[5].

En effet, en janvier, seul le Sénégal et l’Afrique du Sud pouvaient faire le test pour détecter le virus du SRAS-CoV-2., donc en espace de quatre mois, les autres pays n’ont pas pu avoir assez de personnels et de matériels pour faire les tests en masse. Par conséquent, nous ne pouvons même pas nous fier à ces chiffres. Quand on ne teste pas, on ne voit pas. Le virus ne circulerait-il pas calmement ? Dieu seul sait !

En plus de cela, en Afrique la moyenne est que c’est un docteur qui sert 80.000 habitants.

Face à ces réalités, nous ne pouvons pas faire le choix de légèreté dans la prévention. Nous ne pouvons pas attendre de l’assistance de ceux qu’on traite de racistes et continuer à être dans le déni, dans le laxisme aussi bien dans les décisions prises que dans les comportements.

Le catastrophisme projeté sur le continent est certes lié à la persistance de l’afro-pessimisme mais ce regard alarmiste est aussi alimenté par les africains.








[1]CORONAVIRUS : COMMUNIQUE DE PRESSE : Point de Situation sur le COVID-19, http://www.sante.gouv.sn/Présentation/coronavirus-informations-officielles-et-quotidiennes-du-msas [2] Policy Center for the New South, Le Maroc face au Covid-19 : agilité, cohésion et innovation,Policy Center for the New South, https://www.policycenter.ma/sites/default/files/PB%20-%2020-36%20%28Hynd%20Bouhia%29_0.pdf [3] Antonio Guterres : avec le coronavirus, "on risque des millions de morts en Afrique ", https://www.france24.com/fr/europe/20200327-coronavirus-en-direct-entretien-avec-antonio-guterres-secr%C3%A9taire-g%C3%A9n%C3%A9ral-de-l-onu [4] The continent averages less than one intensive care bed and one ventilator per 100,000 people, Reuters found. This compares with 20-31 intensive care beds per 100,000 people in the United States, according to estimates in a 2012 survey for the U.S. National Institutes of Health. [5] Reuters Graphics, Virus exposes gaping holes in Africa’s health systems, https://graphics.reuters.com/HEALTH-CORONAVIRUS/AFRICA/yzdpxoqbdvx/

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